Une sorte de bleu

En 1940, Théo a douze ans et il vient de passer, tant bien que mal, son certificat d'études. Demain, il ira gagner sa vie...
C'est par là que s'achevait. Le Faubourg des Coups-de-Trique; c'est ici que commence Une sorte de bleu, non pas suite mais étape nouvelle, de même que l'adolescence, dans la vie, inaugure toujours une histoire neuve par rapport à l'enfance.
Nous n'avons pas quitté Belfort et son faubourg. Mais la guerre et l'occupation les ont amputés de leurs fièvres collectives. Beaucoup sont absents. Ceux qui restent se replient sur les misères du quotidien. Cette période entre parenthèses est, pour Théo, le temps des rencontres : le petit Léon, par exemple, et son ami, le prodigieux Larbi, vieil Arabe des djebels récupéré par l'armée en 1914 et qui a échoué à Belfort après avoir trimbalé, sur les routes de Lorraine et d'Alsace, un flamboyant spectacle théâtral : Le Fils du désert...
Désormais, Théo travaille chez un serrurier. Son père est mort, sa sueur Agathe, devenue institutrice, vit sa vie bien à elle, et ce qui reste de la famille a dû se résoudre à emménager dans un appartement plus petit. La vie serait donc grise s'il n'y avait Léon et Larbi. S'il n'y avait, aussi, un récit de Jack London que lui prête Agathe. Tout d'abord, ces petits signes noirs le-rebutent. Puis, brusquement, c'est la découverte du pouvoir envoûtant des mots et des histoires. Pour Théo, ainsi, le premier apprentissage du réel passe par le langage : il dévore livre sur livre, se met à écrire. Le second passera par l'Histoire: il rejoindra la Résistance, auprès de Gentil revenu au pays, découvrira la violence, les- combats que l'on croit perdus, la mort... Au bout de tout cela naît un homme…