Du bon usage de la distance chez les sauvageons

AZOUZ BEGAG/REYNALD ROSSINI
La distance qui sépare les quartiers sensibles du reste de la ville élargi le fossé. Il ne s’agit pas de la distance géométrique qui, elle, grâce au développement des transports collectifs a tendance à régresser et favoriser leur intégration physique. Il s’agit de la distance mentale, celle dont parlent les habitants. Progressivement, en effet, les quartiers sensibles sont devenus des ultimes refuges, et depuis une génération la mise à distance des jeunes qui les habitent a nourri chez beaucoup une culture de rouilleur de pied d’immeuble.
Ils jouent et se jouent des distances. Tout ce qui n’est pas d’ici apparaît loin et fini même par être rejeté. Des bus sont caillassés, incendiés. Même les pompiers sont agressés.
Quelle réponses sociales, quand on sait que la notion de sanction n’a plus prise sur certains jeunes dès lors qu’ils investissent en bande les espaces publics ? Leur distance vis à vis des règles de la société les place hors jeu. Dans les quartiers, on les appelle les gremlins ou la caillera (la racaille), au ministère de l’intérieur (sous Chevènnement) les sauvageons. Ils sont nés et ont grandi à distance de la ville, entre semblables, là ou l’éloignement n’est pas un concept inconnu.
Un essai utile au débat d’actualité sur l’éloignement des jeunes délinquants, la proximité des services publics.